L’espace immense est noir, d’une profondeur insondable, une superposition d’ombres et de gris. Pourtant chaque explorateur muni de sa lampe frontale scrute l’espace  les yeux grands ouverts, ayant confiance en ses capacités sensorielles pour en deviner les contours, et trouver l’objet de ses recherches… mais Julie, elle, reste là, ouvre son carton, déploie ses fils, son ordinateur plus transportable que portable, elle connecte minutieusement chaque élément dans une gestuelle si souvent répétée qu’il paraît intuitif. C’est mon collègue qui m’a prêté le dispositif, un océanoptic qui a déjà déchiffré des milliers de joyaux de couronnes et des diamants d’Afrique^*. J’ai confiance, elle a pris le temps de s’approprier le dispositif, elle reste concentrée dans sa préparation. Elle s’assied, pose le cylindre gris enfermant la source de lumière fibrée au monochromateur et surveille son écran, ses doigts s’agitent, elle sort un papier blanc qu’elle glisse sous la boite et recommence l’opération.. Puis enfin elle lève les yeux de ses outils, pour un bref regard de l’espace autour d’elle.. quelques secondes suffisent, la première zone à mesurer est trouvée, elle y pose le cylindre, baisse les yeux à nouveau, tapote et.. son visage s’éclaire, la couleur est enregistrée… Elle se relève, pousse doucement son carton au sol en tirant délicatement sur la rallonge qui l’a relie à une prise extérieure, et recommence l’opération de captation.. mais loin des termes catégorielles, rouge, jaune ou indigo, ce sont des avalanches de chiffres qui sont enregistrés, des ondulations gracieuses, appelée spectres par les scientifiques de l’équipe, tels des fantômes dont l’identité colorimétrique n’est dévoilée qu’en échange de quelques théories..

*Note : les diamants sont éternels : du cristal au bijou ? Gérard Panczer https://www.youtube.com/watch?v=-pGydloepz0

Extrait du journal de bord  

La couleur de l’odyssée était à déterminer parmi les 24 noms, référencés dans un meuble à tiroir, l’ancêtre des serveurs de recherche bibliographiques. Il regroupe les choix des couleurs et montre qu’uniquement 14 tiroirs parmi les 24 ont été sélectionnés et que les deux appellations qui spécifiaient une couleur ont été privilégiées.

Le spectre de réflectance théorique de l’Odyssée macSUP a été obtenu en réalisant une moyenne pondérée des spectres choisis par les explorateurs. Il est tracé dans la figure colorée des gammes spectrales du visible : un maximum est localisé dans le rouge, l’expédition est clairement rouge.

Le spectre de réflectance théorique de l’Odyssée macSUP a été obtenu en réalisant une moyenne pondérée des spectres choisis par les explorateurs. Il est tracé dans la figure colorée des gammes spectrales du visible : un maximum est localisé dans le rouge, l’expédition est clairement rouge.
Le spectre expérimental enregistré sur le caddie par les explorateurs montre une forte discordance entre le modèle théorique et l’expérience, il semble que l’intervention de l’explorateur a blanchit la couleur…